Même pas mort, de Jean-Philippe Jaworski

Durant la Guerre des Sangliers, Sacrovèse, le père de Bellovèse, a été tué par le haut-roi, son beau-frère. Mais comme Ambigat ne peut se déshonorer en tuant aussi sa sœur et ses neveux, il préfère les envoyer en exil dans le fin fond du royaume biturige. Quelques années plus tard, se souvenant de leur existence, Ambigat envoie Bellovèse et son frère Ségovèse à la guerre contre les Ambrones, espérant y voir périr ses neveux. Cependant, tout ne se passera pas comme prévu...  

Design graphique de Sébastien Hayez
Alors que j'en ai lu énormément dans ma prime jeunesse, la Fantasy n'est plus le genre qui a ma préférence aujourd'hui, supplanté depuis quelques années par la Science-Fiction. En effet, j'apprécie beaucoup plus le sense of wonder que m'apporte mes lectures de SF. En réalité, avec la Fantasy, j'ai un peu l'impression de tourner en rond. Peut-être parce qu'il est très difficile de se renouveler (qui a dit que c'était la faute de Tolkien ?)...

Et puis, voici quelques années (cinq, pour être précis), j'ai découvert Jean-Philippe Jaworski et son désormais fameux Gagner la guerre, où l'on suivait les péripéties d'un tueur au service du pouvoir. Ce fut pour moi une véritable révélation, une épiphanie littéraire. Sept-cents pages d'un style incroyable, tel que j'en avais rarement croisé en Fantasy, voire jamais. Et puis, lorsque j'ai su, courant 2012, que l'auteur lorrain était de nouveau derrière son écran pour nous proposer son prochain roman, j'ai tout de suite sauté de joie. Littéralement. Même si, par la suite, j'ai appris que ce roman, Rois du monde, allait être découpé en trois (la fameuse trilogie fantasienne), j'ai un peu tiqué, avant de me reprendre illico : j'allais bientôt avoir ma dose de Jaworski. Oui, parce que le Jaworski est une drogue dure dont il est difficile de se remettre une fois qu'on est tombé dedans. Et si tu l'ignores encore, ami lecteur hypothétique de ce blog, c'est que tu n'as pas eu la chance d'y goûter. Veinard que tu es !

Tout cela pour dire que Même pas mort, la première branche du roman Rois du monde (la suite est annoncée pour 2014 et 2015), se déroule dans un monde totalement différent que celui de Gagner la guerre. Là, on se trouve dans le monde celte, où de très nombreux royaumes se font la guerre. De prime abord, il n'est pas aisé de s'y retrouver avec cette avalanche de patronymes étranges qui tombe sur le lecteur, avec ces noms de tribus celtes (certaines sont connues mais pour la plupart, il m'a fallu aller faire quelques petites recherches pour assimiler un minimum le contexte "socio-politique"), de villes et de rivières (a contrario, le Liger, je n'ai pas eu besoin de chercher). Bref, vous l'aurez compris, Même pas mort n'est pas d'un abord aisé. Cependant, ce qu'on pourrait prendre pour une faiblesse est au contraire une des grandes forces de ce roman. En effet, si les quinze premières pages se méritent, c'est qu'ensuite Jean-Philippe Jaworski nous donne à lire une oeuvre telle que lui seul semble capable de produire. Avec, et ce n'est pas le moindre de ses exploits, un style qui demeure magnifique de bout en bout de son histoire. Même si l'emploi de mots qui, jusque-là, m'étaient totalement inconnus pourrait sembler rédhibitoire, bien au contraire il renforce le côté immersif de ce roman. Cela peut paraître paradoxal, c'est pourtant la vérité. Parce que l'auteur ne vise pas la belle phrase juste pour elle-même. Un tel procédé serait vain. Non, le style déployé par l'écrivain est au service de l'histoire qui, vous vous en doutez si vous avez eu la chance de vous plonger dans les aventure de Benvenuto Gesufal, sont palpitantes de bout en bout. Mais contrairement à l'intrigue développée dans Gagner la guerre, plutôt linéaire, celle de Même pas mort est totalement éclatée. Sans que cela nuise à la compréhension de l'ensemble.

Bref, vous l'aurez compris, j'ai adoré ce livre. Et je ne peux que vous enjoindre à cesser ce que vous faites, sur le champ, pour aller vous le procurer. Même pas besoin de lire Gagner la guerre avant, celui-ci est indépendant. Mais attention, si vous tombez dans le Jean-Philippe Jaworski, vous aurez du mal à vous en remettre. C'est une drogue dure, très dure. Ne venez pas dire que vous n'avez pas été prévenus...

Pour votre dose, allez directement vous servir à la source...

Rois du monde, tome 1 : Même pas mort, édition Les moutons électriques, 306 pages, 23€, 2013 (deuxième tirage)

note : IV (oui, on commence bien l'année 2014 !)

Commentaires

  1. J'ai tellement aimé que j'ai été incapable de le chroniqué.
    Je te rejoins sur tous les points d'ailleurs, je fais aussi partie d'un public qui a une certaine désaffection du genre Fantasy, seul Jaworski sait me trouver .
    Et puis ne te décourage pas, tes chroniques sont excellentes.
    Je constate moi aussi une certaine baisse de fréquentation de mon blog également qui certe manque de dynamique en ce moment.
    Bonne continuation et Jaworski Power !!!

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  2. Merci beaucoup pour ton soutien. Cette impression de crier dans le désert semble partagée par pas mal de monde, mais si mes chroniques ne sont pas plus commentées, je ne peux que m'en prendre à moi-même car moi-même ne vais pas beaucoup commenter les "confrères" et les "consœurs"

    Jaworski Power !!!!

    A.C.

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  3. J'en attends tellement de ce livre que j'ai presque peur de l'entamer et de ne pas aimer. Pourtant, il trône depuis quelques mois sur ma table de nuit...

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    1. Alors, si je peux me permettre un petit conseil, cesse toutes tes lectures en cours pour te plonger dans celui-ci, tu ne le regretteras pas. Pour ma part, c'est exactement ce que j'ai fait et, comme tu as pu le constater avec cette chronique, ce fut un régal. A mon avis (humble, comme il se doit), si tu as aimé "Gagner la guerre", tu ne peux qu'adorer "Même pas mort".

      A.C.

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  4. Bon, je note le passage des quinze premières pages ; je peux le faire. Ce qui est moins sûr, c'est pouvoir attendre les prochains tomes avant d'acheter celui-ci.

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  5. Merci pour ce bel article qui fait connaitre ce bel ouvrage, et sur lequel j'ai écrit quelques mots pour le faire connaître à d'autres, qui ...

    Non, non non, Biturige n'est pas mort, (bis)
    Car il blogue encore ! (bis)

    http://lebiturige.blogspot.fr

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    1. Heureux que cet article te plaise et merci pour le lien !

      A.C.

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